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Défaut de spiritualité - Spiritualité par défaut

Francis Marche - Forum de l'In-nocence - mai 2008

 

Retour en Malaisie après cinq ans d'absence: les femmes voilées de noir ne s'y remarquent plus - nombre d'entre elles se masquent le visage d'un voile de crêpe funèbre, ne laissant voir que leurs yeux, bouleversants de mobilité, de vie, de frayeurs, de signaux de panique ou d'enthousiasme contradictoires, fuyants, indéchiffrables, où grouillent mille codes (le masque - qui doit avoir un nom arabe que je ne connais pas - fait plus qu'exalter le regard: il impose à la femme de faire par lui s'exprimer tout ce que son corps absent, son habillement absent, ne peuvent plus exprimer).

En contrepoint de ce mouvement, partout inexorable, de progrès de l'emphase islamique, la Malaisie est devenue la Mecque du tourisme indien matérialiste. L'Inde qui pour Madame Blatvatski, Rudolf Steiner ou Annie Besant et leurs amis de l'Adyar avait été la terre promise du monde futur - terreau de spiritualité par excellence - , vient d'embrasser le matérialisme industriel, comme d'ailleurs la Chine et avant elle encore le Japon. L'Inde a trahi l'espoir théosophique d'un âge nouveau et vient d'embrasser sur la bouche le XIXe siècle le plus maudit qui soit aux théosophes.

Impossible, en Malaisie, de ne pas corréler ces deux évolutions: le besoin de spiritualité ferait dans l'humanité une somme constante; dans cet équilibre de vase communiquant le monde musulman s'affirme avec violence - et quelle violence ! - dernier territoire de résistance au matérialisme. Mais qu'on se penche sur le langage de l'Islam, sa geste, son esthétique, son éthique générale: il n'est rien, il est plus que pauvre, moins que pauvre, plus que vide, plus que noir. L'exact contrepoint vide et noir au trop-plein, au trop débondant de couleurs et de formes du matérialisme planétaire triomphant.

Le Herald Tribune en ligne de ce jour présente un article sur une femme belge de 48 ans, internaute djihadiste, veuve d'un des assassins du commandant Massoud, passionaria islamiste qui depuis son ordinateur personnel appelle par de longues diatribes et incantations quotidiennes (livrées en français) à la destruction de l'Occident. La photo de l'article montre cette femme, qui ressemble à celles que l'on peut croiser ici : elle est une tache noire, un programme spirituel par défaut, qui n'existe, que la civilisation matérielle ne tolère, que comme ombre d'un plein spirituel qui l'a désertée. Par sa noire absence d'ornement, de palpable signe de tout sens autre que le gouffre-objet du Coran, cette personne semble offrir un pendant nécessaire à l'écoeurante corporéité du monde qui l'abrite (et la finance : l'Etat belge lui remettant 800 euros par mois en allocation chômage, apprend-on).

Il est probable que si toutes les civilisations à vocation spirituelle, l'indienne, la chrétienne d'Occident, la chrétienne d'Orient, la chinoise, la japonaise, sombrent corps et bien et définitivement dans le matérialisme le plus bas, le plus plein et le plus ivre de lui-même, le Djihad vaincra par nécessité autant que par défaut.

Le noir programme de mort que nous imposent et où nous attirent les Osama Ben Laden, programme spirituel vide (le plus con du monde, comme l'a si bien caractérisé Houellebecque) nous engloutira comme un trou noir cosmique. Les trous noirs cosmiques punissent ainsi l'opulence de lumière, le dégorgement de néon, auxquels cèdent certaines galaxies. Si rien n'est fait pour régénérer l'esprit en Occident - l'Inde et la Chine sont trop jeunes encore dans leur ordalie matérialiste pour pouvoir compter sur elles -, ce miroir de mica noir de notre défaut de spiritualité, qui recouvre la face des femmes du crêpe de notre deuil de Dieu, dont la vocation est de nous engloutir, irrésistiblement, nous engloutira.

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