Pour revenir à mon propos sur l'OAS. Cette organisation (aujourd'hui, je crois qu'on dirait "mouvance") fut l'ennemi absolu, parfaitement accompli et incarné, de la cinquième République, et elle fut identifiée telle par cette dernière jusqu'à son anéantissement. Aux yeux des responsables politiques de la cinquième République, cet ennemi appartenait à la classe lui-ou-moi. Il fallait, par tous les moyens, l'exterminer, jusqu'à en rayer le nom du vocabulaire commun. Et tous les moyens furent employés pour ce faire. Absolument tous. On n'hésita pas à enroler des tueurs à gages, d'anciens gestapistes pour en venir à bout. Dans ces années-là, la
République de paix montra que, si elle se trouve un ennemi véritable, tout lui est bon pour l'abattre, tous les moyens les plus sales et odieux.
Cela pour vous amener à réfléchir sur
l'interdit de publicité dont sont frappés aujourd'hui les images des tueries islamistes de Nice et du Bataclan. La République a ordonné que serait épargnée au public, aux citoyens, la vue de ces horreurs, celle de cadavres d'enfants déchiquetés sur la promenade des Anglais, celle des mutilations barbares subies par les victimes du Bataclan, au point qu'aujourd'hui personne n'est sûr que ces images existent vraiment.
Or il se trouve que le coup le plus dur infligé à l'OAS, celui qui ruina en un jour tout le capital de sympathie dont cette organisation pouvait jouir en métropole fut quand celle-ci, organisation terroriste et ô combien terrifiante, commit une attaque à l'explosif au domicile d'André Malraux à Boulogne-Billancourt -- c'était le 7 février 1962 -- blessant grièvement une fillette de cinq ans nommée Delphine Renard. Les images de la fillette blessée au visage (elle devait perdre un oeil) furent aussitôt publiées par les médias aux ordres du pouvoir, dont Paris Match. Ces images étaient terribles. Elle assassinèrent moralement l'OAS. Le pouvoir, ce jour-là, gagna sa guerre contre cette organisation par ces photos de Paris Match. La photographie de l'enfant, soigneusement légendée « ce visage mutilé accuse l’OAS » fit la une de l'hebdomadaire. Dans ses mémoires, la fille du chef (et figure tutélaire) de l'OAS qu'était Raoul Salan, raconte que son père, à la vue de ces images, résolut en privé d'abandonner la lutte.
Telle est la force des images d'enfants mutilés dans la lutte contre "le terrorisme". Et quand la République est déterminée à abattre son ennemi, elle sait en user.
L'enseignement à tirer de cette histoire est assez clair et évident : la République, en 2016,
aime trop son supposé ennemi pour lui faire cela ! En épargnant tartuffièrement au public les images de ses tueries,
c'est l'ennemi qu'elle épargne, qu'elle préserve, qu'elle choye ! Et du reste, ne parle-t-elle pas de lui financer ses mosquées, de le protéger dans ses droits et prétentions ?
Les terroristes islamistes, s'ils étaient par la République perçus comme l'ennemi à abattre, celle-ci aurait déjà usé contre eux des armes dont elle a su efficacement faire usage par le passé. La République, soigne, préserve les assassins de l'Islam -- elle est elle-même trop sensible pour leur faire trop de tort !