Le site du parti de l'In-nocence
Le parti de l'In-nocence attache la plus grande importance à l'Éducation, et il entend lutter pour que l'École et le corps professoral soient pleinement rétablis dans leur dignité éminente, dans leur sérénité, et dans le rôle majeur qui leur incombe pour la transmission effective des connaissances et des valeurs.

Le parti de l'In-nocence est favorable au rétablissement de l'autorité dans les pratiques d'enseignement, autour d'un principe pleinement assumé d'inégalité entre les maîtres et les élèves - inégalité de rôles, bien entendu, inégalité provisoire, seule garante à ses yeux d'une véritable égalité des chances d'acquisition du savoir.

Afin de bien marquer ces rôles, justement, leur caractère de rôle social, c'est-à-dire de non-coïncidence avec la personne, et afin de souligner le détachement délibéré, proclamé, calculé, de l'École par rapport à la vie quotidienne extérieure, avec ses contraintes, ses rivalités et ses inégalités à elles, le parti de l'In-nocence recommande, et il s'attachera à promouvoir, l'adhésion de tous, au sein de l'École, à une exigence de formalisme mesuré, mais constant, portant sur le costume aussi bien que sur le langage, sur les attitudes comme sur l'expression de soi-même et de ses opinions.

L'École n'est pas, selon lui, le lieu du naturel, même si elle y prépare comme à la liberté, à la citoyenneté et à l'in-nocence. Elle est le site de la rencontre avec la forme, et de son imposition par l'exemple, la persuasion, l'exercice et les textes. On n'y apporte pas le tout de soi-même, on n'y vient pas comme on est, on accepte de s'y soumettre à la règle qui régit pareillement le contrat social et l'éducation, celle du "moins pour le plus". La politesse, la délicatesse, la gentillesse et au premier chef l'humanité y sont chez elles, tandis que le relâchement du costume et la trivialité du langage n'y ont en aucune façon leur place, non plus que la violence, bien sûr, ou la familiarité.

Le respect doit y être mutuel, évidemment, mais entre le maître et l'élève il ne saurait être symétrique en son expression.

De la part des professeurs le nom sera seul en usage, pour les élèves, parce que le nom est le garant de la parole, il la signe, et la place sous le sceau de la responsabilité ; tandis que le prénom relève de l'intime, et n'a pas à sortir du cercle de famille, et des relations entre congénères.

Pour des raisons du même ordre, et toujours en hommage à la forme, le vouvoiement seul aura cours, entre les professeurs et les élèves. Grossièretés, vulgarités, abréviations inutiles seront considérées comme à proscrire. Si les maîtres sont aimés, ainsi qu'il est souhaitable, ce devra être pour leur compétence et leur humanité, non pour leur complaisance, leur laxisme ou leur démagogie de manières.

*

Le parti de l'In-nocence est favorable au rétablissement dans leurs formes plénières des enseignements traditionnels tels que la littérature, la philosophie et l'histoire, enseignements qui seront dispensés comme jadis selon des axes chronologiques, seuls à même d'établir des structures véritables dans l'esprit des élèves et de constituer un rempart contre l'invasion de ces matières par l'idéologie, l'opportunisme téléologique, et les diverses sortes d'endoctrinement.

Il est favorable au rétablissement, dans l'enseignement général, de l'étude du latin et du grec, d'abord parce qu'il considère ces matières comme éminemment formatrices de façon générale, ensuite parce qu'il y voit l'un des fondements principaux de la culture occidentale, et enfin parce que, favorable à l'Europe, il estime qu'elles sont un précieux facteur de compréhension mutuelle et de cohésion, entre les peuples européens.

Il n'est nullement hostile à une initiation scolaire à l'informatique, à internet et aux dites "nouvelles technologies", dans la mesure avérée où ces matières peuvent être de très précieux instruments complémentaires de connaissance et de recherche, leur maîtrise précoce et l'analyse didactique de leurs mécanismes devant servir à prévenir et à déjouer les dangers d'abêtissement et d'asservissement intellectuel qu'elles comportent aussi, selon l'usage qui peut en être fait.

Le parti de l'Innocence s'oppose à la diminution du nombre des heures et des jours d'enseignement véritable, à la multiplication des "stages", des "discussions", des "heures de vie de classe" et autres "moments de convivialité", à la réduction des ambitions et des espérances quant à la qualité et la quantité de ce qui peut et doit être transmis par le moyen de l'École. Il demande le retour à des trimestres qui soient des trimestres et à des semaines de travail qui soient des semaines de travail. Il considère que l'éducation est l'un des dons les plus précieux qui puissent être fait aux enfants et aux adolescents, et il estime que ce don ne saurait être transformé en la simple proposition d'une liberté dans l'expression de chacun. Il juge que la véritable liberté de l'expression n'est pas première, mais qu'elle est au contraire, comme l'in-nocence, la conséquence et la récompense d'un combat contre la nocence, en l'occurrence contre l'ignorance et souvent contre la violence naturelle ou sociale. Il est favorable à la forme magistrale de la plus grande part des enseignements.

Il préconise le retour à des formes réellement significatives, et donc sélectives, des examens divers, et, non sans ambition, il se donne pour objectif une réduction annuelle d'au moins cinq pour cent du nombre proportionnel des bacheliers au sein d'une classe d'âge, jusqu'à ce que ce nombre soit ramené à cinquante pour cent ou en deçà. Bien entendu il n'est nullement hostile, tout au contraire, à la diffusion aussi large que possible des connaissances, ni, en soi, à la multiplication des diplômes et des diplômés. Mais il tient, de la manière la plus stricte, à ce que l'évaluation des connaissances et l'attribution des diplômes ne soient en aucune façon soumises aux exigences dérisoires d'un élargissement purement numérique et nominal de la culture, de la science, de la technique et du nombre de ceux qui sont censés les détenir. Accroissement du nombre des diplômés, oui - mais à niveau d'exigences constant pour l'attribution des diplômes : et ce niveau doit d'abord être considérablement renforcé, afin d'être ramené à ce qu'il était avant la dévaluation presque générale de l'enseignement et de ses critères d'évaluation.

Comme la grande majorité des jeunes professeurs, le parti de l'In-nocence réclame l'abandon du collège unique.

Mais, plus radicalement, s'agissant en particulier de l'enseignement secondaire, il propose une division en trois niveaux : enseignement général, enseignement professionnel, enseignement "intermédiaire" permanent (ou "complémentaire").

L'enseignement général tel que le conçoit le parti de l'In-nocence est réservé aux élèves qui par leur assiduité, leur application et leurs résultats témoignent qu'ils le méritent, qu'ils éprouvent véritablement la volonté personnelle de se le voir dispenser, et qu'ils ont la capacité d'en bénéficier. On ne contraint personne à s'y plier, mais on n'y maintient pas ceux qui n'en observent pas les règles, qui n'ont pas la possibilité de s'y soumettre ou qui nuisent, par leurs attitudes ou leurs limitations, à l'essor intellectuel des autres et au niveau général. Il ne s'agit nullement d'un enseignement obligatoire. Au contraire, il est réservé à ceux qui ont le désir de le recevoir, et les moyens d'en tirer avantage sans compromettre les progrès scolaires de leurs camarades. C'est la connaissance et sa transmission, la formation générale et son exercice, à plus long terme le niveau culturel du pays dans son ensemble, qui représentent, en l'occurrence, l'exigence centrale et l'idéal premier.

L'enseignement professionnel comporte un enseignement général, moins approfondi que celui de l'enseignement général proprement dit, et assorti d'une variété d'enseignements spécialisés, orientés vers des fins professionnelles de plus en plus précises avec les années.

L'enseignement "intermédiaire" permanent, ou "complémentaire", égal aux deux autres en moyens et en quantité d'effectifs, assure qu'aucune situation personnelle non souhaitée n'est jamais figée, tout en s'attachant au contraire à protéger les situations scolaires à la fois souhaitables objectivement et souhaitées par les intéressés. Cet enseignement intermédiaire, ou complémentaire, est parfaitement compatible, pour les élèves, avec chacun des deux autres. Éventuellement il s'ajoute à eux. Il apporte un soutien scolaire efficace aux élèves de l'enseignement général qui, malgré le désir qu'ils en ressentiraient, éprouveraient de la difficulté à s'y maintenir, en particulier à cause de désavantages tenant à leur origine sociale, économique ou culturelle, ou bien à leur état de santé, à leur condition psychologique, à leur situation de famille. De même, et principalement, il apporte un soutien personnalisé aux élèves de l'enseignement professionnel qui, à quelque moment que ce soit de leur cursus scolaire, auraient la volonté de rejoindre l'enseignement général et de poursuivre en son sein leurs études.

L'enseignement "intermédiaire" permanent, ou "complémentaire", est confié à un corps pour ainsi dire "volant" de professeurs qualifiés, et sauf exception il n'est pas lié à des édifices scolaires particuliers. A son fonctionnement est associée la gestion de fonds publics destinés à alimenter un système de bourses, lui-même destiné à assurer qu'en aucun cas l'éducation d'un enfant ne puisse être entravée par des considérations sociales et financières.

Le système d'enseignement "complémentaire", très développé, devrait exister également au niveau de l'enseignement primaire. Son rôle de complément s'exercerait aussi à l'échelon universitaire, et devrait être agissant, même, tout le long de la vie des citoyens, qui pourraient à tout moment faire appel à lui pour accroître leurs connaissances, renforcer leurs compétences professionnelles ou accéder, à quelque âge que ce soit, aux sphères les plus hautes de la culture.

*

Le parti de l'In-nocence est parfaitement conscient que son programme relatif à l'Éducation, essentiel à ses yeux, est très difficile à mettre en œuvre, et risquerait de susciter les réserves, voire l'hostilité, de sections importantes du corps professoral et des diverses parties prenantes au système éducatif tel qu'officiellement il fonctionne encore de nos jours.

Le parti sait bien d'autre part que le corps enseignant, pour une très large part, est déjà, et qu'il a été de longue date, professionnellement, culturellement, idéologiquement, le produit de ce système éducatif même dont il s'agit de constater le délabrement, de mesurer l'inefficacité formatrice, et d'entreprendre la rénovation radicale.

C'est pourquoi le parti de l'In-nocence, dans un premier temps, se propose d'entreprendre la reconstruction de l'École sur la base du plus strict volontariat, base rigoureusement conforme, au demeurant, à ses vues les plus profondes sur l'éducation et sur la connaissance, qui doivent être avant tout des objets de désir, à son avis, et dont il est capital qu'elles soient prodiguées dans les meilleures conditions à ceux qui veulent vraiment se les voir transmettre, et qui de ce seul fait ont le droit de se les voir transmettre, et dans les meilleures conditions.

Ainsi devraient être ouverts un à un, en fonction des désirs exprimés, des établissements d'enseignement conformes au programme ici même exposé, et où n'enseigneraient que des professeurs qui l'auraient voulu, à des élèves qui le voudraient, et selon le vœu de parents qui auraient fait choix pour leurs enfants d'établissements de cette sorte. De tels établissements il n'y aurait pas en plus grand nombre que ne les souhaiteraient ces trois parties concernées, professeurs, parents et enfants. Ils seraient ouverts non tant en fonction des besoins qu'en fonction des désirs exprimés - à charge pour eux de se rendre désirables, s'ils ne l'étaient déjà, auprès du plus grand nombre possible d'intéressés.